Elle n’a que 28 ans et déjà trois ans de guerre derrière elle. Une guerre qu’elle mène dans le Rojava avec les YPJ, les unités combattantes de femmes kurdes de Syrie, contre l’organisation de l’« État islamique ». Les armes à la main, elle défend « la liberté, le socialisme et des droits identiques pour les femmes et les hommes ».
La première fois que je l’ai vue, c’était tout de même dans un drôle d’endroit : la ligne de front au sud de la ville d’Hassaké. Sous les coups de boutoir des forces kurdes, YPG et YPJ (les femmes), les djihadistes de l’organisation de l’« État islamique » (EI ou Daech) avaient battu en retraite, fin juillet, mais se tenaient à quelques centaines de mètres – un kilomètre tout au plus – de là. Impressionnant !
Une fois la dernière butte de défense passée, alors que s’étend un désert rocailleux, on distingue quelques baraques où se sont dissimulés les égorgeurs de Daech. C’est alors que je l’ai d’abord entendue. « Il y a quelqu’un qui parle français, ici ? » demandait-elle à la ronde, sachant bien que personne ne pouvait la comprendre, à l’exception de ce fameux francophone. « Ah, ça fait du bien.
Je n’ai pas parlé le français depuis trois ans », avoue-t-elle tout de go. « Ici, quand je parle français, tout le monde rigole. Remarquez, je les comprends, ça les détend. » On est un peu interloqué. Pensez donc ! Sur cette ligne de front bien instable et incertaine, se dresse soudain devant nous une grande fille vêtue d’un treillis militaire et le front ceint d’un turban comme en portent les femmes kurdes. Un visage ouvert.