Cette passionnée de ranchera a créé le premier ensemble français de cette musique traditionnelle mexicaine composé exclusivement de femmes... et résolument engagées.
Comme souvent au Mexique, tout a commencé au son des guitares et des trompettes, des violons et de la vihuela, sans oublier le profond guitarrón. Nous sommes en 1998, État du Chihuahua (Nord) : Alicia Leos n’a pas encore 20 ans quand elle écoute pour la première fois la célèbre version par Pedro Fernandez de la chanson l’Aventurier, un grand classique du mariachi. Le rythme est endiablé, les paroles aussi excentriques qu’impayables : d’une pointe à l’autre du pays, de Cancún à Tijuana, difficile de résister à l’entraînante allégresse que provoque cette chanson à la gloire d’un sympathique bon vivant, chaleureux troubadour et bohème, qui sait conquérir les cœurs des femmes comme personne. « À l’époque, je n’avais pas encore conscience d’être féministe, mais je sentais bien que quelque chose clochait », explique-t-elle.
Il lui faudra un peu de temps pour se rendre compte que, derrière des sous-entendus polissons, se cachent en réalité des propos ultra-machistes, « un maillon de plus dans cette chaîne de normalisation du harcèlement des femmes ». Comme dans nombre de pays latino-américains, le Mexique voit en effet la violence du patriarcat se répandre jusque dans les chansons les plus populaires d’une musique traditionnelle qui fait pourtant sa fierté, reconnue patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’Unesco.